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MEDS.STORY

Fin 2004, Wembley Arena, Placebo tire sa révérence jusqu’à la prochaine.
Une retraite en Inde, une mini tournée caprice en Amérique du Sud et un séjour semi studieux dans le sud de la France plus tard, les revoilà repartis en studio à l’heure des grandes vacances pour nous concocter l’album qui verra le jour au printemps prochain…

Le nom du producteur est connu depuis un certain temps. Le franco-russe Tikovoi.
Surprenant.
Il n’est pas très connu dans ce rôle là, on ne le voyait pas faire autre chose que mixer des singles. Et surtout, son monde, c’est l’electro. Plus electro encore que celui de Jim Abbiss.

Un break assez court interrompu par une tournée marketing surprise en Amérique latine, plus un producteur de techno music assez kitsch…Les esprits n’étaient pas tranquilles.

Quel étonnement alors quand au fil des rares interviews accordées avant l’automne on entend parler de choses aussi étranges que «  retour au sources » , « son rock saturé de guitares », « un nouveau premier album » etc… Ca ressemblait presque à de l’ironie.

Pourtant les rumeurs se font informations, et les premières reviews de journalistes confirment : Placebo fait du rock. Bonne nouvelle.

Une démarche qui ne suit pas la logique du trio, qui revenait à chaque fois avec le même credo : Evoluer, toujours évoluer.
Lui qui a toujours conçu la constance dans le son comme une régression, lui qui ne peut s’empêcher de rire de ses confrères les yeux rivés sur le rétro, le voilà qui nous parle carrément de retourner en arrière!
Au moins de quoi réjouir les fans des opus 1 et 2.

Premiers échos rassurants donc, alors qu’en dehors du laboratoire, les plus impatients d’entre nous attendaient fébriles comme à la porte d’une salle d’accouchement les premiers sons libérateurs…

Ils sont à Londres, à la maison, c’est plus pratique vu les circonstances. Dans les presque délabrés studios Rak, vieille bâtisse aux plafonds bas et au décor suranné. Un lieu « vintage » qui colle à l’ambition du producteur, mettre le groupe à nu, loin de la technologie de pointe aseptisante. Placebo la précieuse va devoir se salir les mains sur du bon vieux matos, et ça ne peut pas lui faire de mal.

Il faut s’entendre préciser par le groupe que les sessions d’enregistrements furent « cool » décontractées et décadentes. On dénombre la quantité de bouteilles, bon indice de rock’n rollitude.

Ce groupe de trentenaires bien avancés, qui semble presque pantouflard en comparaison aux chiots fous de la décennie précédente (et pour cause) est soucieux néanmoins de se montrer à la hauteur de sa réputation.
Un Placebo ça parle de cul, de drogues, de la mort, ça veut tuer et se tuer…
Un membre de Placebo ça boit, ça déconne en studio, ça fait chier les voisins, et ça écrit entre deux cuites.
On se demande presque ce que Dimitri Tikovoi fait au milieu de ça.

Pourtant, lui, il confisque les joujoux, les force à refaire connaissance avec leurs instruments, et fait retomber leur enthousiasme à jouer les nouveaux savants fous de la scène electro-rock…

Mais comment fait un Placebo pour revenir 10 ans en arrière ? 
Il repasse par toutes les cases qu’il a franchi, tout simplement.
Résultat : un album qui tient autant du Sleeping With Ghosts, du Black Market Music que du Without You I’m Nothing.
On s’amuse du début à la fin à reconnaître les différentes époques. D’entrée de jeu : Tiens !?! Every You Every Me !! Un Follow The Cops Back Home à mi chemin entre un Narcoleptic et un Black Market Blood, jusque dans les paroles. Un Pierrot The Clown qui se situe entre un Peeping Tom et un Centerfold, un « My oh my, a song to say goodbye » qu’on pourrait chanter sur l’air de « Dry your eyes, ‘cause soulmates never die » et ainsi de suite…

Et bien sûr, les machines s’entendent encore.
Retour aux sources peut être, cependant on est encore loin d’un son nude à la White Stripes..

Mais en effet comme prévu, les guitares sont là, et elles hurlent à la mort. « Promise is a promise » …
13 morceaux, des pianos, des violons même (consentis à corps défendant si on a bien compris) et pleins de grattes sur la plupart des titres, au point de ne plus parvenir à définir qui fait quoi à certains moments.
Un son trapu qui évoque plus les gros métalleux américains que les brodeuses britanniques, et toujours cette sonorité pop qui les caractérise depuis toujours.
Placebo fait du Placebo : Du mélange de genres. Et de l’inattendu.  Ils sont l’un des meilleurs groupes à ce jeu là.

Flood vient ensuite faire sa mise en relief de ses doigts de fée. Lui qui s’est toujours refusé à Placebo, le voilà qui se propose pour la final touch, le mixage.
Brian Molko a avoué que Placebo lui a très longtemps fait une cour assidue, et que ces derniers se sont à chaque fois retrouvés dans la peau de l’amoureux reconduit.
C’est que ce n’est pas n’importe qui Flood! Producteur de génie, de U2 à PJ Harvey, en passant par Nick Cave et ses Bad Seeds et les Smashing Pumpkins, il est à l’origine aussi de la production des deux légendaires Songs Of Faith And Devotion et Violator de Depeche Mode.

Sa mission : Relever le rythme, remettre le rôle de Steve en valeur, lui qui a tellement souffert de la production de Sleeping With Ghosts.
Mais le choix reste quand même la mise en avant très nette du chant Brian, et des guitares stridentes.

Pour les thèmes, exit les métaphores sophistiquées et la cure de désintox du 4ème album. On revient aux rails de coke, aux gueules de bois et aux déprimes post-coïtum. 
C’est comme le son, ça laisse des tâches.
Sauf que là, c’est un groupe adulte qui écrit. Brian Molko ne se sent plus obligé désormais d’expliquer ses textes par sa pauvre vie déjantée. Il sait enfin qu’on peut écrire avec autre chose que son propre sang…
Tout est prêt. La pilule est emballée et livrable de suite.

Conclusion : Un groupe de joyeux buveurs âgés d’une trentaine d’années, ma foi plus si décadents que ça, et qui peut sans trop de peine fournir un album ultra efficace, très bien écrit, le rock mélodique et fusionnel dont il a le secret. Que demander de plus ?

Nad